mercredi, mai 10, 2006

Le billet de Pierre Chappaz : La France 2.0

[DEBUT]
Cette semaine après un court passage à Londres pour rencontrer plusieurs start-ups, je suis venu faire deux conférences sur le Web 2.0 et les medias, l'une à Capital IT mercredi et l'autre jeudi à la conférence Microsoft Mix.
Le salon Capital IT qui existe depuis les premiers temps de l'Internet en France a pour vocation de faire se rencontrer les entrepreneurs à la recherche de financements et les investisseurs, ces fameux capitaux-risqueurs qu'on appelle en anglais venture capitalists. La nuance sémantique est significative, puisqu'on parle ainsi en français d'investissement à risque, avec une connotation quelque peu négative, là où les Anglo-saxons disent venture (aventure) qui connote plutôt positivement. Il n'est pas inintéressant de noter ceci peu de semaines après l'épisode du CPE qui a montré — au-delà de l'arrogance maladroite du Premier ministre — combien la société française reste tétanisée face au chômage: les Gaulois se passionnent plus pour le droit du travail que pour la création d'entreprises et adorent traiter les méchants patrons de tous les noms! Pourtant, ce sont bien les entreprises qui parviendront peut-être un jour à faire reculer le chômage... Les jeunes devraient développer le plus possible leurs propres connaissances, leur curiosité naturelle, leur goût du risque pour entreprendre! Les Etats-Unis ont créé depuis deux générations des millions d'emplois dans les entreprises de technologie, qu'est-ce qui empêche la France et l'Europe d'en faire autant? certainement pas les compétences...alors quoi? le manque d'envie d'entreprendre! Je n'aurais donc pas dû être surpris comme je l'ai été du peu de dynamisme que j'ai perçu à ce salon Capital IT.
Alors que Les Etats-Unis connaissent une vague de création de nouveaux services web sans précédent depuis la fin des années 90, la France compte toujours les projets sur les doigts des deux mains. Pourtant, il n'a jamais été aussi facile d'entreprendre sur l'Internet: les technologies sont beaucoup plus puissantes et faciles d'emploi qu'il y a cinq ans, le budget nécessaire pour démarrer, même pour un projet relativement ambitieux, ne se compte plus en millions mais en quelques dizaines de milliers d'euros, les investisseurs tentés par l'aventure sont relativement nombreux et prêts à financer les bons projets... mais rien ne bouge ou presque. Il y a beaucoup trop peu de nouveaux venus dans le monde des créateurs de services Internet!
Rien de bouge? Ah! si! Chirac a confirmé cette semaine l'engloutissement de 250 millions d'euros de l'argent des contribuables dans un projet fumeux de moteur de recherche européen censé faire pièce à Google. Le hic, c'est que les entreprises sélectionnées pour bénéficier du robinet financier sont de vieilles boîtes dont le chef de file est Thomson, dont les préoccupations — et malheureusement aussi les compétences — se situent à des années lumières du Web. Ce projet chimérique illustre à nouveau l'incompétence du Président en matière de technologie (mais ça on le savait déjà). Là où c'est plus grave, c'est quand on pense qu'au lieu de gâcher une telle fortune au bénéfice de quelques mastodontes industriels du siècle dernier, Chirac aurait pu avec le même montant aider au financement de milliers de nouvelles start-ups, ce qui aurait transformé la France en véritable Silicon Valley 2.0 !
Mais le Président ne doit pas savoir que Yahoo! et Google ont tous deux été conçus dans une chambre d'étudiant par des entrepreneurs de 20 ans! Les mêmes qui ont ensuite trouvé auprès des capitaux-risqueurs les moyens de leur fantastique développement. Avec un nouveau Président (ou bien une) l'an prochain verrons-nous poindre cette France 2.0 seule capable de dépasser les blocages et de relancer la création d'entreprises tournées vers le futur?
Pierre Chappaz, fondateur du site Kelkoo et ancien patron de Yahoo Europe, conseille désormais le principal fonds d'investissement Internet en Europe, le genevois Index Ventures. Parallèlement à une activité de «business angel» qui lui fait investir avec Marc Andreesen — le fondateur de Netscape — et Martin Varsavsky — le créateur de FON (réseau wifi mondial) — dans Netvibes, il prépare un tout nouveau moteur de recherche d'informations, Wikio, qui sera ouvert au public dans les prochaines semaines. Pierre Chappaz tiendra chaque semaine une chronique sur Libération.fr pour nous faire vivre, décrypter et commenter la nouvelle frontière de l'Internet. JHLEn savoir (un peu) plus ici et là, sur Kelblog.
[FIN]

[SOURCE]
http://www.liberation.fr/page.php?Article=378389#

[SAM]
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